Une famille (presqu')ordinaire
A chaque fois, à
peine nos petites graines avaient-elles germé dans mon ventre que nous
avions commencé à leur raconter leur histoire. Durant les grossesses,
nous les caressions en leur expliquant comment elles étaient arrivées
là. A leur naissance respective, je leur ai longuement raconté leur
histoire, notre drôle d'histoire. Au fil du temps, le conte de
ces jolis dons qui nous ont permis ce bonheur d'être mamans est devenu
un petit rituel sans être pour autant un passage obligé : au gré de nos
discussions, nous évoquons ce papa qui n'en est pas vraiment un mais
sans qui rien n'aurait été possible et qui pour cela occupe une place
très importante dans nos cœurs.
Hier, après m'avoir demandé le matin sur le chemin de l'école De quelle couleur c'est à l'intérieur de moi ? ma grande MissLou a soudain déclaré au dîner : "Je ne veux plus Mimi, je veux un papa !",
nous laissant quelque peu interloquées. Sa Mimi lui a demandé doucement
où elle irait alors sans nous et la demoiselle a répondu "Dehors."
avec une douceur dans la voix qui rendait encore plus crue la teneur de
son propos. Nous avons alors discuté de toutes les sortes de famille
qui existent : avec un papa et une maman, avec deux mamans, avec deux
papas, avec deux mamans et deux papas, avec juste une maman, avec juste
un papa, sans papa ni maman ... Nous lui avons raconté à nouveau son
histoire, lui avons susurré au creux de l'oreille à quel point nous
l'avions désirée, à quel point nous étions heureuses de cette vie qui
nous avait été offerte et qui devenait une si jolie grande fille, de ce
bonheur immense d'être ensemble toutes les quatre. MamzelleLilise qui
grignotait un morceau de fromage n'en perdait pas une miette.
J'ai conclu en répétant à quel point je suis heureuse d'avoir fabriqué ces deux petites filles avec Mimi, que je suis fière
d'une si jolie famille et quand j'ai demandé à MissLou si, finalement,
elle était contente de notre famille, elle a insisté : "Non, je ne suis
pas contente parce qu'il n'y a pas de Tiffany."
Ouf, si la seule
chose qui manque à son bonheur c'est une petite sœur qui porte le
prénom de sa copine du moment, nous sommes peut-être sauvées !