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Les petits carnets
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10 janvier 2009

Quand l'émotion coule en musique

Première semaine de reprise à barrer sur le calendrier mais pas si facile que ça à rayer de mon esprit.
Depuis que j'enseigne ici, je rentre rarement indemne de mes journées et je passe de longues heures la nuit, les yeux grands ouverts, à tenter de chasser de ma pensée les mots et l'image d'un élève ou l'autre. Rien qu'aujourd'hui, j'étais finalement plutôt contente de revoir Y : renvoyé à la Toussaint, parti alors en internat, puis renvoyé de l'internat une semaine après, revenu chez nous trois semaines plus tard "en attente d'une décision", soi-disant en partance cette semaine pour un nouvel atelier-relais mais bloqué ici par la neige et qui est venu me demander si je l'accepterais à mon cours cet après-midi car il ne savait plus trop comment s'occuper ni où aller. Pénible durant toute l'heure : regardez moi, regardez moi, entendez-moi, écoutez-moi, regardez-moi, j'existe ici encore un peu alors écoutez-moi, écoutez-moi, regardez-moi, je suis là, ne m'oubliez pas... Il a planté mon cours mais j'étais finalement bien contente de le savoir là. Décidément, je ne m'habitue pas à la misère. Ni à la colère.
Et puis, il y a eu l'agitation trop violente de MissLou ces deux derniers soirs pour ne pas soupçonner des émotions trop fortes vécues dans la journée par la petite fille qui manque sans doute encore de mots pour les exprimer autrement. Tant de découvertes et si peu de repères pour les appréhender. Et nos doutes quant à la meilleure façon de l'aider à faire son chemin. Et cette insupportable idée qu'elle peut souffrir, ne serait-ce que trente secondes par jour, sans que je sois à ses côtés à ce moment-là.
Et aussi les grands pas en avant de notre MamzelleLilise qui se lance à imiter nos intonations et surtout les sons que l'on produit en parlant ce qui donne des semblants de bouts de phrases étonnants comme ce "émamaman" presque crié en s'accrochant à moi alors que sa sœur me réclamait et qui m'a mis les larmes aux yeux hier. Et surtout son inquiétant pas en arrière avec ce reflux qu'on espérait enterré bien profond et qui semble revenir nous renvoyant d'un coup en pleine face sa prématurité, sa douleur, notre impuissance au moment où on s'y attendait le moins, où on croyait tout cela derrière nous. Et la peur d'avoir à refaire tout ce chemin une nouvelle fois.
Et encore les tourments de ma Pacsette ces derniers jours, ses doutes, son  désespoir, et in fine une bonne nouvelle qu'on n'osait même plus espérer : un entretien lundi matin, le tout premier en trois mois, pour pas grand chose mais c'est toujours mieux que rien. Et la crainte de s'emballer, de trop y croire, de retomber plus bas.
Et enfin les cris du monde extérieur qui grondent dans ma radio, les morts qui tombent à Gaza, l'image des mères bafouée par le gouvernement français, toutes ces vies gâchées, tout ce mépris, ces mensonges permanents ...
Et moi, dans tout ça ? j'absorbe ces émotions, je gère comme je peux, je ne me laisse pas trop le temps d'y penser toute la semaine et là, soudain, au détour d'un vendredi soir comme les autres, quand la pression se relâche, quelques notes, un filet de voix, le souvenir d'une jeune artiste aux pieds nus, des mots qui me saisissent

[Découvrez Emily Loizeau!]

et soudain tout ce trop plein d'émotions qui coule sur la musique.

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